mercredi 27 janvier 2010

Avon aime ses poupons


Oui, mais pas à n'importe quel prix.

Les affiches ont couvert la ville tout le mois de décembre. Avon est étrange : c’est une des dernières villes qui éduque visuellement ses citoyens. On se croirait dans l’URSS des années soixante ou dans une république bananière dirigée par un prince président. De nombreux lecteurs éclairés nous ont fait part de leur indignation : comment peut-on utiliser l’image des enfants pour faire passer une décision municipale très contreversée ?

Regardez la photo ! Une jeune femme s’occupe avec amour d’un groupe d’enfants, un petit blond est au premier plan, tout n’est que bonheur à la halte-garderie. Avon aime ses poupons !

La réalité est tout autre. En juin 2009, la mairie d’Avon décide de privatiser le service de la petite enfance. La crèche familiale qui emploie 15 assistantes maternelles et assure la garde de 50 enfants est confiée à une société privée qui prend également en charge 20 enfants à la halte-garderie nouvellement créée.

Pourquoi avoir abandonné une fonction aussi stratégique dans une commune ? Les normes évoluent et sont de plus en plus complexes, des erreurs de recrutement ont déstabilisé le service, les élus et les cadres ne se sont pas suffisamment investis dans l’action vers les petits enfants.

Une solution de facilité et très à la mode s’est imposée : confier à un prestataire renommé et compétent tout le dossier. Le contrat signé est catastrophique pour la ville : Avon investit dans les locaux, puis confie la gestion à son partenaire. L’encaissement financier est toujours à la charge de la ville qui prend les risques de non recouvrement et doit assurer la liaison avec les parents. Le prestataire perçoit forfaitairement chaque année la somme de 1 250 000 €. C’est près de 9% du budget de la ville. Le déficit qui était de 400 000 € passe à plus de 720 000 €. Hors halte-garderie, le surcoût net pour la ville est de plus de 200 000 €.

L’aspect humain est encore plus grave. Le personnel communal a été licencié puis transféré vers la société dans un statut très précaire. On avait avancé des avantages en nature comme des tickets restaurants, mais aujourd’hui l’ambiance est morose, on ne parle plus que de rentabilité et la porte est grande ouverte pour ceux qui restent attachés à un service communal.

Les enfants sont les grands oubliés : le marketing du prestataire met en confiance les parents mais le lien humain est brisé et la qualité des prestations n’est pas celle promise.
Tout cela pour assurer la garde de 20% des petits Avonnais de moins de trois ans. Les autres sont pris en charge par leur maman qui s’arrête de travailler, les grands-parents qui reprennent du service ou par les assistantes maternelles libérales qui font un travail remarquable. Dans les années 80, il y avait près de 150 enfants à la crèche familiale ; en 15 années de gestion Le Poulain l’offre de services a fortement baissé pour un coût toujours plus élevé.

Dans la région plusieurs villes telles Montereau ou Moret/Loing ont développé d’autres politiques de la petite enfance. Elles ont compris qu’il fallait aider les jeunes mamans à poursuivre leur activité professionnelle en leur offrant une solution de garde de confiance. C’est aujourd’hui un plus qui incite des jeunes couples à venir s’installer dans une agglomération.

Une ville qui progresse est une ville qui propose un vrai projet pour la petite enfance.

Ps : un des dirigeants de la société prestataire a été placé en garde à vue il y a deux semaines pour … escroquerie.